L’Ecotaxe seule ne règle pas la problématique du trafic camions

Mise à jour le mercredi 23 mars 2021

Depuis quelques jours on reparle de l’écotaxe au travers de l’article 32 de la loi Climat qui sera discutée à partir du 29 mars à l’Assemblée nationale. Les médias nationaux citent souvent l’Alsace comme territoire concerné par ce texte, sauf qu’avec la loi Alsace, la nouvelle Collectivité européenne d’Alsace (CEA) est déjà compétente à mettre en place de telle taxe. Elle prépare son application à l’horizon 2024-2025.

Dans un communiqué, notre collectif rappelle qu’il a toujours soutenu la mise en place d’une écotaxe en Alsace. Elle faisait partie de solutions alternatives au GCO et reste d’actualité face à la problématique du trafic poids lourds, notamment celui lié au report allemand dû à la LKW Maut.  

La question du trafic routier reste entière.

Mais face à la pollution notamment celle des particules fines due au trafic routier (48 000 décès par an), l’actualité autour du retour possible de l’Ecotaxe fait oublier qu’au-delà de la question de taxer les camions (pollueur-payeur), celle du trafic routier et plus particulière celui des poids lourds, est une problématique qui reste entière. L’écotaxe seule ne suffit pas à interagir sur ce trafic : où sont les mesures pour en réduire les nuisances ? (on parle de vraies mesures).

A Strasbourg, le Contournement ouest annoncé début 2022 est présentée par son concessionnaire (ARCOS/Vinci) comme un axe favorisant le flux des marchandises entre le nord et le sud de l’Europe via la plaine d’Alsace. En claire, l’autoroute de Vinci imposée par l’État va transformer notre région en couloir à camions (dénoncé notamment ici), loin du projet présenté à l’enquête publique de 2006 et vendu par la CCI Alsace comme permettant de désengorger Strasbourg. Ainsi, Vinci a besoin d’un maximum de poids lourds pour rentabiliser sa future autoroute. Une contradiction qui piège l’Etat et les collectivités.  

Agir sur le trafic routier… un paradoxe ! Vinci a besoin de beaucoup de camions pour rentabiliser son autoroute. L’idée de faire baisser le trafic poids lourds n’est pas une perspective économique de la multinationale. La pollution n’est pas son affaire (malgré le greenwashing de sa fondation qui prône l’écologie).

Les enjeux climatiques poussent notamment à la recherche de solutions pour réduire les nuisances du trafic routier et notamment celui des camions. La Convention citoyenne pour le climat a pointé cette problématique et en a fait des propositions. Or, en Alsace, les pouvoirs publics se sont piégés à soutenir le GCO qui rappelons-le, est une autoroute en concession privée à péage. Si Vinci n’atteint pas ses objectifs commerciaux, qui va payer le manque à gagné ? D’autant qu’il existe déjà une close d’un dédommagement financier, si l’interdiction de circuler des poids lourds sur l’A35 traversant Strasbourg n’est pas effectif à l’entrée en service de l’A355 prévue en 2022.

D’ailleurs, l’une des nombreuses conséquences du dossier GCO : la charge du périphérique de Strasbourg tombe sur les épaules de l’Eurométropole.

La saturation des axes routiers autour de Strasbourg n’est pas résolue !

L’A35 traversant l’agglomération strasbourgeoise est devenue la M35 depuis le 1er janvier. Ce transfert de compétences de l’État à l’Eurométropole va s’accompagner de changement à venir sur cet axe routier.

Ainsi, l’Eurométropole prépare plusieurs mesures touchant à la circulation sur la M35. Pour notre collectif, ses mesures sont en phases avec nos propositions touchant à la mobilité. Le bémol et il est de taille, c’est comment interagir sur le trafic routier lorsque l’on sait que le GCO ne permettra pas une baisse significative de celui-ci. Pire, il est prévu une augmentation des poids lourds en amont et en aval de la nouvelle autoroute dans la configuration politique actuelle. Les responsables sont l’État, la Région et le Département… pas l’Eurométropole dans sa nouvelle composition depuis les dernières élections municipales.

Sans actions agissantes sur le trafic routier, la saturation des axes autour de Strasbourg et la traversant (M35) reste et restera préoccupante, même après la mise en service du GCO.

Réduire le trafic camions sans pénaliser le transport local

Il y a urgence à agir. La nouvelle Collectivité d’Européenne d’Alsace (CEA) a les moyens de le faire. Elle est compétente à la mise en oeuvre d’une taxe poids lourds sur notre territoire, mais doit également veiller à lever les doutes et inquiétudes qu’elle fait naitre chez les transporteurs locaux qui assurent la desserte locale et les accompagner à réduire leur empreinte carbone en concertation avec les autres collectivités et organismes dédiés.

Des paroles d’intentions à résoudre les enjeux climatiques
qui ne se traduisent pas sur le terrain par manque de courage politique.

L’écotaxe seule ne règle pas la problématique du trafic camions. Plus généralement, c’est la question du trafic routier et ses conséquences (saturation des routes dans les grandes agglomérations, pollution, …) qui peine à être résolu. Construire plus de routes n’est plus la solution.

Face aux enjeux climatiques, nous attendons toujours une prise de conscience réelle et visible sur le terrain par l’Etat. Or, avec la future loi « Climat et Résilience », le compte n’y est pas. D’ailleurs, les notes de la Convention citoyenne pour le climat dont la loi devait reprendre 146 des 149 propositions, sont terribles : 3,3 sur 10 à la prise en compte par le gouvernement de ses propositions, et de 2,5/10 à l’évaluation du degré auquel « les décisions du gouvernement relatives aux propositions de la CCC permettent […]

En France, des projets d’entrepôt géant du type Amazon, de contournements et nouvelles routes dont l’utilité est discutable et discuté (1), continuent d’animer le terrain des luttes… Notre terre brûle et ils –les décideurs politiques et économiques à la solde des multinationales– regardent ailleurs.

  • (1) exemple d’un projet annexe au GCO : une liaison entre la future autoroute de Vinci et l’aéroport d’Entzheim qui desservirait également une nouvelle zone d’activité entre Hangenbieten et Entzheim. 

REVUE DE PRESSE

Reporterre – Extrait (GCO non merci est cité dans l’article) – « Selon le collectif GCO Non merci, qui milite contre la construction du grand contournement ouest autour de Strasbourg, «16.500 poids lourds [traversent chaque jour en semaine l’agglomération strasbourgeoise par l’A35, ndlr] dont environ 2.000 qui se reportent en Alsace pour échapper à la Maut, la taxe poids lourds en Allemagne, mise en place en 2005». Le collectif salue cette décision mais alerte tout de même sur le fait que «l’écotaxe seule ne suffit pas à interagir sur ce trafic» puisque «l’autoroute de Vinci [le grand contournement ouest] imposée par l’État va transformer notre région en couloir à camions». »