Les aléas climatiques mettent les routes sous tension.

L’état général du réseau routier français se dégrade. Le coût de l’entretien des routes explose. Le désengagement de l’État dans l’une de ses missions devient un casse-tête financier pour les élus locaux. Et pour ne rien arranger, les aléas climatiques accentuent la menace.

« L’état général du réseau routier tricolore inquiète. Il est passé de la 1re à la 18e place au classement du forum économique mondiale » en moins de 10 ans. Selon un rapport de 2021, il faudrait investir 22 milliards d’euros dans les routes d’ici à 2050, et 12 milliards d’euros d’ici à 2035 pour les ponts.
L’entretien des routes est devenu un casse-tête financier et les conséquences du dérèglement climatique pèsent sur les budgets dédiés et oblige à faire des arbitrages politiques auquel les services doivent composer dans la planification des chantiers à réaliser. Aux travers d’exemples, nous l’abordons ici :

Réseau routier : le bout de la route ?

ICI 19/20 Alsace, dans son émission du samedi 18 mai, a abordé la question des routes dans sa partie nationale. Notre réseau routier va mal… très mal… lire la suite

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– SOURCE : BOURSORAMA AVEC MEDIA SERVICES

Lorsqu’une route doit fermer, « les impacts socio-économiques peuvent être considérables avec derrière des ruptures de service, d’accès à la santé, de communication… ». Et face à la multiplication des aléas climatiques, les infrastructures françaises sont vulnérables, comme l’illustre l’éboulement en vallée de Maurienne du 27 août 2023, avec une voie ferrée, une route départementale et une autoroute coupées : 15 000 m3 de rochers sont tombés à cause de fortes pluies juste après un épisode caniculaire — Cet épisode est évoqué dans le reportage d’ICI 19/20 du 18 mai et que vous pouvez revoir ici ou .

Les crues exceptionnelles qui ont frappé le Pas-de-Calais, douché par des pluies diluviennes à plusieurs reprises cet hiver, ont coupé et endommagé jusqu’à 10% des routes du département, relève encore Sophie Cahen, de la Fédération nationale des travaux publics (FNTP), qui rassemble les entreprises de la construction. Ailleurs en France, les précipitations abondantes ont coupé plusieurs axes cet hiver à cause de glissements de terrain à Nice, en Dordogne, dans le Cantal ou le Calvados. À chaque fois les routes, dont des morceaux de chaussées se sont écroulés, ont dû fermer plusieurs semaines, isolant certains hameaux.

« Les crues torrentielles et les feux de forêt, on connaît mais ça devient plus fréquent. […] Des territoires autrefois à l’abri ne le sont plus « , explique David Zambon, directeur général adjoint du Centre d’études et d’expertises sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (Cerema), un établissement public pour l’adaptation des territoires au changement climatique.

Avec près de 1,1 million de kilomètres de réseau, la route est la « colonne vertébrale » des transports en France , loin devant le train et ses 33 000 kilomètres de voies ferrées. Environ 75 % des trajets domicile-travail s’effectuent en voiture, par la route. Ils représentes près de 52 % des trajets de moins de 2 km.

[INFOGRAPHIE] Pyramide de la mobilité

Si vos planificateurs de mobilité ne suivent pas cette hiérarchie, ils travaillent activement contre… lire la suite

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« Si vos planificateurs de mobilité ne suivent pas cette hiérarchie, ils TRAVAILLENT ACTIVEMENT CONTRE les objectifs de durabilité et de qualité de vie », introduit la PYRAMIDE DES MOBILITÉS.

Si la route est la « colonne vertébrale » des transports en France, elle ne doit pas pour autant rester centrale dans l’aménagement du territoire. L’entretien du réseau existant est une nécessité, mais sortir de logique du tout-routier en est une autre.

Sécheresse, montées des eaux, amplitudes de températures…

Si les pluies et les crues constituent les principales menaces, des amplitudes de température plus grandes réduisent la durée de vie des routes, affirme l’IDRRIM (Institut des routes, des rues et des infrastructures pour la mobilité). Autre phénomène menaçant, la sécheresse, dont « l’ampleur s’observe depuis une dizaine d’année de manière importante avec les retraits gonflements d’argile » qui fissurent et déforment les chaussées, remarque David Zambon. La subversion marine est une autre inquiétude majeure : 1 765 km de routes structurantes sont menacées par l’érosion côtière en raison de la montée du niveau de la mer d’ici 2100, d’après une étude du Cerema parue début avril.

Région particulièrement concernée : le bassin méditerranéen est considéré comme un « hotspot » du changement climatique . La région Provence-Alpes-Côte d’Azur a mis en place une méthode innovante pour évaluer précisément les vulnérabilités sur son territoire. « On vient de commencer infrastructure par infrastructure l’étude de vulnérabilité. À partir de quel moment on a des ruptures, à partir de quand on a des dégradations… On éprouve ces infrastructures aux différents scenarii », explique Jean-Pierre Serrus, vice-président de cette région encore marquée par le drame de la vallée de la Roya dévastée par la tempête Alex en 2020.

L’adaptation s’impose de plus en plus à l’agenda des élus locaux -seuls 20 000 km de route relèvent du réseau national.

Diagnostiquer les vulnérabilités aux aléas climatiques actuels et futurs

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« Le modèle économique est insuffisant », reconnaît Jean-Pierre Serrus. « La façon dont on perçoit les recettes et on dépense ne peut pas résoudre tous les axes de notre stratégie de transition écologique », admet-il. D’où l’idée d’établir un diagnostic précis et des priorités : une absolue nécessité si l’on suit le scénario envisagé par le gouvernement d’une France à +4°C d’ici la fin du siècle (par rapport à 1850-1900), estime Jean-Pierre Serrus.

D’après un rapport du cabinet Carbone 4 de 2021, les routes exigeraient 22 milliards d’euros d’investissements curatifs à réaliser entre 2035 et 2050 , « lorsque les conséquences physiques du changement climatique se feront plus nettement ressentir ». Pour les ponts, 12 milliards d’investissements préventifs sont à réaliser avant 2035, selon la même source.

« Aujourd’hui les routes doivent, du fait de l’évolution climatique, laisser plus circuler l’eau. Elles doivent, quand elles sont en milieu urbain, participer à rendre l’environnement plus vivable, éviter les îlots de chaleur », explique Bernard Sala, responsable de l’innovation chez Colas (filiale de Bouygues), spécialiste des travaux routiers et ferroviaires.

Tout cela coûte plus cher mais si on n’investit pas maintenant, « les décisions se reporteront sur l’avenir » , indique-t-il. « Et on n’a pas trouvé grand chose d’autre qu’un support routier pour accueillir l’ensemble des mobilités. »

LE CONSTAT ET APRÈS ?

La fermeture d’une portion de l’autoroute A13 en avril 2024 a mis en évidence la mauvaise santé de notre réseau routier français. « Aller dans le mur, c’est un métier » a ironisé Olivier Razemon, journaliste indépendant et auteur français, spécialisé dans l’actualité des transports dans plusieurs médias.

Mais que fait l’Etat ? Il continue d’investir massivement dans de nouvelles routes et a entrepris de transférer aux départements, voire aux régions ou aux métropoles, les voiries non concédées relevant à ce jour de sa compétence (articles 38 à 41 de la loi 3DS 2022-217 du 21 février 2022).
Avec ce transfert de compétences, l’Etat transfert également la charge de l’entretien du réseau existant non concédé à des collectivités dont les budgets d’entretien des routes qu’elles avaient déjà à leur charge, sont âprement discutés chaque année.
Et que font ces collectivités ? Au lieu de réviser leurs politiques en matière de mobilité, elles continuent d’investir dans le tout-routier et allouent des sommes conséquentes à la réalisation de nouvelles routes, souvent cofinancées avec l’État, et à l’agrandis-sement d’autres, dont l’utilité est discutée et est discutable.

ROUTES : « ALLER DANS LE MUR, C’EST UN MÉTIER. »

A quand une remise en question du tout-automobile ? Toutes ces nouvelles routes sont-elles vraiment nécessaire ? L’entretien du réseau existant n’est-il pas une feuille de route suffisamment pourvoyeuse d’emplois ?

La coalition La Déroute des Routes estime que les projets routiers représentent près de 20 milliards d’euros d’argent public. Quand on sait qu’il faudrait investir 22 milliards d’euros dans les routes d’ici à 2050, et 12 milliards d’euros d’ici à 2035 pour les ponts, remettre en question la pertinence de ces projets routiers a du sens. C’est justement le but du moratoire que la coalition défend.


Le collectif GCO NON MERCI dans ses 10 solutions pour faire sauter les bouchons, milite pour des mobilités douces et durables