Pollution : Le transport routier c’est 16,6 % des GES en Europe.

Nous avons évoqué à plusieurs reprises la part du transport dans les émissions de gaz à effet de serre (GES) en France, parfois comparées à celles dans le monde. Ici, nous nous intéressons à ce qui se passe en Europe.

Savez-vous quelle quantité de CO2 est rejetée par votre voiture, ou si les voitures électriques sont vraiment plus propres ?

Avant d’aller plus loin, il est essentiel de garder à l’esprit que s’intéresser à un secteur géographique a certes, un intérêt spécifique à notre zone de vie, mais que ce secteur est un élément d’une globalité qui concerne la planète… notre mère Terre. Nous n’en avons qu’une !

Selon l’Agence européenne pour l’environnement (AEE), l’Union européenne à 27 a émis environ 3,31 milliards de tonnes de gaz à effet de serre (GES, en équivalent CO2) en 2021 -[1], comme le montre le graphique ci-dessous. Ce chiffre est largement en deçà des niveaux d’avant la pandémie, mais l’agence souligne que les émissions de GES ont connu un rebond de 6 % en 2021 par rapport à 2020. Cela s’explique en partie par la reprise économique favorisée par la levée des restrictions sanitaires.

De 1990 à 2020, l’UE a ainsi réduit de 32 % ses émissions de GES, bien au-delà de son objectif de – 20 %. Mais, dans le même temps, les émissions liés au transport ont augmenté -[1].

LE TRANSPORT C’EST 23,2 % DES ÉMISSIONS DE GES DANS L’UE.


Selon un rapport de l’Agence européenne pour l’environnement, le transport était responsable d’environ un quart des émissions totales de CO2 de l’union européenne en 2019, soit 23,2 %.

Les transports ont émis 110 millions de tonnes de plus en 2021 qu’en 1990, soit une hausse de plus de 16 % -[2].


LE TRANSPORT ROUTIER RÉPRESENTE 16,6 % DES ÉMISSIONS DANS L’UE.


La part du transport routier représente à lui seul près des trois quarts des émissions de GES pour la part transport, soit 71,7 %.

Si on considère tous les secteurs émetteurs, ramené à l’échelle des émissions totales, le transport routier pèse 16,6 % de ces émissions -[2].


DECARBONER LE TRANSPORT : UN ENJEU DE FACADE !

Dans le cadre des efforts visant à réduire les émissions de CO2 et à atteindre la neutralité climatique d’ici à 2050, conformément à la feuille de route du Pacte vert européen, une réduction de 90 % des émissions de GES provenant des transports est nécessaire d’ici à 2050, par rapport aux niveaux de 1990.
Problème, le transport est le seul secteur où les émissions de gaz à effet de serre ont augmenté au cours des trois dernières décennies, avec une hausse de 33,5 % entre 1990 et 2019.
Il ne sera pas facile de réduire de manière significative les émissions de CO2 dues aux transports, car le rythme de réduction des émissions a ralenti.

Infographie: Les émissions de gaz à effet de serre provoquées par les transports dans l’UE

Les émissions de gaz à effet de serre provoquées par les transports dans l’UE

Camions lourds et légers : une transition en trompe l’œil

Pour faire face, le lobby routier ambitionne de décarboner le transport de marchandises. Les camions lourds et légers représentent 38,1 % des émissions du transport routier, soit 6,32 % des émissions totales.
Si l’intention est louable, il s’agira avant tout de verdir l’image de la profession tout en ne changeant rien des objectifs de rentabilité qui consistent à transporter toujours plus de tonne-kilomètre (tkm).
On nous parle d’autoroutes vertes, de camions utilisant une motorisation électrique (2 % du parc des camions lourds en France en 2023), d’autoroutes avec caténaires… sauf que 2050, c’est demain !
Et quand la profession est questionnée sur la lenteur de sa transition, elle pointe les insuffisances structurelles comme le manque de bornes de recharge électrique sur le réseau routier et les aides des pouvoirs publics.

Véhicules légers : la voiture n’est pas l’avenir de la mobilité !

L’électrification du parc automobile est un enjeu pris en considération par les constructeurs depuis un peu moins d’une décennie. On le constate notamment avec l’intensification des publicités vantant la voiture électrique (VE) comme le modèle « tendance » et d’avenir. L’UE ambitionne la fin du moteur thermique pour 2035.
En 2019, la part des émissions du transport routier de la voiture et des motocyclettes représentaient 61,9 %, soit 10,27 % des émissions totales. Si la VE émet moins de CO2 qu’une voiture thermique (VT), reste tout de même des problèmes récurrents :

  • Un VE émet autant de particules fines qu’un VT
  • Si l’électrique est l’avenir de la voiture, la voiture n’est pas l’avenir de la mobilité.

Décarboner le transport sans revoir notre mobilité : la mission impossible !

Selon les projections actuelles, la diminution des émissions du secteur des transports d’ici à 2050 ne serait que de 22 %, ce qui est loin des ambitions actuelles.
Ce n’est pas nous qui le constatons, mais le Parlement européen lui-même -[2].

La France occupe la deuxième place en termes d’émissions de gaz à effet de serre, après l’Allemagne. Sa position de leader en Europe lui confère un rôle primordial dans la lutte contre les défis climatiques dont il n’est pas digne et ce, même si son discours laisse entendre le contraire. La réalité sur le terrain, avec l’ajout constant de nouvelles routes et de zones logistiques, par exemple, met en évidence le décalage entre les déclarations et les faits : le 10 avril dernier, le gouvernement français a annoncé la liste de près de 167 « projets d’envergure nationale ou européenne », dont 28 % sont des projets d’infrastructures routières, exclus de l’obligation de zéro artificialisation nette d’ici à 2050, fixée par la loi ZAN. Voilà la réalité !

Sans une remise en question de la mobilité des personnes et des marchandises, vouloir décarboner le transport est une utopie, un enjeu de façade.


Quel avenir pour notre mobilité ? © 2024 Photo Mathilde Cybulski / Rue 89 Strasbourg

REMETTRE EN QUESTION LA MOBILITÉ DES PERSONNES ET DES MARCHANDISES.

Réduire les émissions de GES du transport routier de manière plus rapide est possible. Pour cela, il existe des infrastructures existantes, comme le réseau ferroviaire.

L’UE possède l’un des réseaux ferroviaires les plus denses au monde -[3]. Face aux enjeux climatiques, elle ambitionne de les structurer : électrification de lignes continues entre les États membres, adaptation des systèmes ferroviaires nationaux. Le but est d’accroître le transport de marchandises sur de longues distances et de faciliter le transfert d’une part importante du transport de la route vers le rail. Mais la réalité sur le terrain montre l’absence d’une réelle volonté politique, notamment des pays membres, pour atteindre ces objectifs, alors qu’elle est la seule réelle solution rapide et à moindre coût pour décarboner le transport routier. Une situation à contrario des discours d’intention, comme on peut l’entendre en France.

D’autre part, les autorités publiques, qu’elles soient européennes ou nationales, ne remettent pas suffisamment en cause la définition même du transport, en particulier celle qui concerne le trafic routier. Sans remettre en question la mobilité des personnes et des marchandises, la décarbonation du transport reste un argument marketing pour se donner bonne conscience.

Décarboner le transport routier a du sens, si et seulement si, on révolutionne notre regard sur la mobilité. Cela implique d’avoir du courage politique et une bonne pédagogie.

Le Pays de Galles a remis en question ses projets routiers en 2021. Le courage politique existe face aux lobbies.


Le collectif GCO NON MERCI dans ses 10 solutions pour faire sauter les bouchons, milite pour des mobilités douces et durables


  1. source 1 / Infographie : les émissions de gaz à effet de serre dans l’Union européenne ↩︎

    Equivalent CO2
    Le CO2 reste, de loin, le gaz contribuant le plus aux émissions de gaz à effet de serre. Il représente par exemple 75 % des émissions en France en 2018, contre 13 % pour le méthane.
    Au dioxyde de carbone (CO2) s’ajoutent le protoxyde d’azote (N2O), le méthane (CH4) et quatre gaz fluorés. C’est cet ensemble d’émissions que l’on nomme “gaz à effet de serre” (GES). Ceux-ci sont convertis en “équivalent CO2” (CO2e ou CO2eq) pour pouvoir les comparer et mesurer leur impact sur le réchauffement climatique.

  2. source 2 / Émissions de CO2 des voitures : faits et chiffres (infographie) ↩︎
  3. source 3 / Politique de transport ferroviaire ↩︎