La dépendance automobile tourne en rond : sortons-en !

– mise à le 1er août 20223 à 15h10

Le concept de dépendance à l’automobile reflète le fait que cette dernière soit devenue indispensable pour l’ensemble des déplacements quotidiens d’une majeure partie de la population.

La dépendance à l’automobile, c’est quoi ?

La dépendance à l’automobile est un phénomène mondial fondé sur la perception sociale et psychologique de la nécessité de l’utilisation de la voiture pour chaque trajet. Celle-ci se manifeste surtout dans des contextes d’étalement urbain et en temps de crise, lorsque le prix des carburants augmentent significativement (pic pétrolier et/ou contexte international géopolitique)Wikipédia

La principe :

Cette notion de dépendance s’explique par la loi des rendements décroissants : plus l’utilisation augmente, plus l’effet désiré diminue, jusqu’à un point où la prise doit être régulière pour rester dans un état normal, créant ainsi un état de dépendance.

Facteurs d’explication

L’étude de Kenworthy et Laube en 1999 et Dupuy en 1999 explique la dépendance à l’automobile par deux phénomènes :

  • Le premier phénomène est surtout constaté dans les banlieues, les zones pavillonnaires périurbaines, mais aussi les campagnes où l’automobile est souvent le seul moyen de transport ou le moyen prédominant pour l’accès aux services (surtout pour les familles avec enfant, ou pour les personnes âgées qui ont plus de mal à marcher), réduisant ainsi le libre choix des résidents quant à leur manière de se déplacer. Elle est notamment due aux formes urbaines développées depuis l’apparition de l’automobile, au service de cette dernière, qui ont souvent, durant plus d’un siècle peu à peu exclu ou mis au second rang les autres formes de mobilités : étalement urbain.
  • Le second, relevant plus de la sociologie, voire d’une sociopsychologie de l’automobile, est une dépendance psychologique à l’automobile (ou à un certain type d’automobile liée à l’image et au statut social, voiture chère, sportive, SUV, 4 × 4, de collection, etc.). Il peut susciter du déni, notamment face au dérèglement climatique, auquel la voiture contribue très significativement.

« Docteur, ma mobilité est malade ! »

Ce graphique montre les cercles vicieux qui ont mené à la prédominance de la voiture dans nos mobilités… Et même à une situation de forte dépendance pour de nombreuses personnes.

La réalité des faits

La dépendance à l’automobile dans la vie quotidienne est une réalité sociétale dans le choix individuel de nous déplacer. Ainsi, 63 % des Français indiquent que l’automobile est leur principal mode de transport — selon l’ « Observatoire des mobilités partagées et électriques » 2023 SIXT x IFOP. Ils sont 75 % à l’utiliser comme le principal moyen de transport dans le cadre de leurs déplacements pendulaires (domicile-travail) — selon le Baromètre « Mobilité & entreprises » 2022 Alphabet France x IFOP.
Pourtant, toujours selon ce baromètre, 35 % des actifs ont indiqué qu’ils n’hésitent pas à utiliser des modes de déplacement doux lorsqu’ils le peuvent. « Des chiffres importants donc, mais qui ne suffisent pas à détrôner la voiture comme étant le principal mode de déplacement chez les actifs français » constate Ornikar

La dépendance à l’automobile dans la vie quotidienne est de 69 % selon l’Ifop

« De fait, cet usage très majoritaire de la voiture s’accompagne d’un sentiment de dépendance pour 69% des Français », analyse l’Ifop qui relève une corrélation entre ce ressenti et la catégorie d’agglomération dans laquelle vivent les personnes interrogées. 92 % des ruraux estiment ainsi être dépendants de la voiture contre 47 % de ceux de l’agglomération parisienne et le sentiment de dépendance décroît avec la taille de l’agglomération.

77 % des individues utilisent la voiture comme moyen de transport dans leurs trajets du quotidien (pour aller au travail, sur leurs lieux de loisirs, faire des courses, etc.), selon l’Ifop.

Aussi, l’aménagement du territoire influence directement le mode de transport privilégié par la population. Une urbanisation étalée augmente les distances à parcourir, ce qui provoque une utilisation massive de l’automobile.

L’aménagement du territoire est à revoir

Détails sur les facteurs qui sous-tendent cette dépendance.

En France, la mobilité est largement structurée par la voiture. Quelques chiffres pour l’illustrer :

  • Selon les sources, ce sont 80 à 85 % des ménages qui possèdent une voiture, et 35 % qui en possèdent plusieurs. En 2020, le parc automobile était estimé à 36,09 millions de véhicules ;
  • La voiture représente 75 % des trajets domicile-travail — 9 conducteurs sur 10 sont seuls dans les voitures sur ces trajets ; ce qu’on appel l’ « autosolisme » ;
  • Tous trajets confondus, la voiture représente quasiment les deux tiers des trajets, des temps de transport ou des kilomètres parcourus par les Français.

La voiture s’est progressivement imposée comme le couteau-suisse de la mobilité. 77 % des individues l’utilisent comme moyen de transport dans leurs usages quotidiens : depuis le trajet court pour aller chercher son pain au départ en vacances en famille, par exemple. Rares sont les distances (< 1 km ou >1000 km) ou territoires (très grandes villes) où la voiture ne domine pas.

Cette prédominance s’est souvent transformée en dépendance, quand la voiture devient la seule solution de mobilité. Une situation particulièrement présente hors des plus grandes villes. Parmi les facteurs ayant contribué à cette dépendance automobile, on a :

  • les avantages intrinsèques de la voiture : rapidité, trajets porte-à-porte, flexibilité, confort…
  • l’accès à une énergie abondante et peu chère : le pétrole ;
  • la hausse du niveau de vie, permettant de diffuser l’automobile et rendre acceptables ses coûts ;
  • un réseau dense d’infrastructures de transport (des ruelles jusqu’aux autoroutes), du stationnement abondant et souvent gratuit ;
  • un aménagement du territoire par et pour la voiture : étalement urbain, hausse des distances, mitage (éparpillement)…
  • nos modes de vie et des programmes d’activités structurés autour de la voiture
  • un soutiens publics importants, pour l’industrie automobile, par la fiscalité, les investissements en infrastructures, la faible régulation des externalités…
  • des soutiens publics importants, pour l’industrie automobile, par la fiscalité, les investissements en infrastructures, la faible régulation des externalités…
  • la diffusion d’une culture automobile, via la publicité, le cinéma, les médias, événements, etc.
  • une marginalisation progressive des autres modes : dangerosité et distances trop longues pour la marche et le vélo, souvent trop de dispersion des flux pour des transports en commun efficaces…

De nombreuses politiques publiques ont contribué et contribuent encore à alimenter ce cercle vicieux de la dépendance à l’automobile, tels que les projets (auto)routiers restants ou des aides au changement de voiture plus fortes que les aides au changement de mode. Les exemples ne manquent pas.

Il faudrait pourtant rentrer dans un cercle vertueux inverse, au vu des conséquences liées à la voiture :

  • environnementales : climat, consos de ressources, d’espace…
  • sociales : coût financier, temps de transport importants, inégalités d’accès à la mobilité…
  • ou encore sanitaires : pollution de l’air, pollution sonore, accidentalité, inactivité physique…

Selon le ministère de la Transition écologique, 80,8 % des kilomètres parcourus par des voyageurs en France le sont avec ce mode de transport. Pourtant, son empreinte sur le climat est considérable. « Le transport est l’activité qui contribue le plus aux émissions de gaz à effet de serre de la France. En 2019, il représentait 31 % des émissions françaises », note le gouvernement dans son rapport sur l’état de l’environnement. Et parmi ces émissions, plus de la moitié (51 %) est due aux déplacements en voiture.

Sur l’aspect sanitaire, « les effets négatifs de la voiture sur la santé seraient sous-estimés », rapporte Science et Vie.

– source :

Sortir de la logique du tout-routier

Avec la coalition La Déroute des Routes, nous demandons un moratoire sur les projets routiers. Notre objectif est de sortir de l’idée de tout-voiture ou tout-camion afin de réduire les conséquences mentionnées plus haut.
Nos détracteurs/trices nous opposent leurs conditions de vie, comme quoi ce n’est pas nous qui subissons par exemple les embouteillages. Beaucoup de blablas et de mauvaise foi. Vouloir remettre en question notre mobilité de demain ne signifie pas être contre l’automobile et son éradication.

Il n’y a clairement pas de remède magique à la dépendance évoquer, et la voiture n’est pas près de disparaître. Nous en sommes conscients. Il faudra donc combiner de nombreuses alternatives pour sortir de la dépendance à la voiture individuelle, mais aussi transformer les types de voitures et leurs usages.

A l’avenir, la voiture devra ainsi être : moins utilisée, « électrique » — selon certains, mais qui fait débat — plus partagée et plus sobre. Un sacré défi collectif à engager. Une révolution dans notre mentalité, nécessaire et urgente.

Sortir de la dépendance à la voiture ne sera pas possible pour tout le monde. C’est une réalité factuelle abordé dans cet article et ici. Cependant, la réduire est possible. Aujourd’hui, seul le courage politique manque pour y parvenir et une éducation populaire pour expliquer.

Dans le contexte sociétale dans laquelle nous sommes, il est possible de réduire la dépendance à la voiture. Il faut juste le vouloir !


Le collectif GCO NON MERCI dans ses 10 solutions pour faire sauter les bouchons,
milite pour des mobilités douces et durables