La question du MORATOIRE posée au Sénat

Le mardi 29 novembre, le sénateur écologiste Guillaume Gontard a questionné le gouvernement au sujet du MORATOIRE sur les projets routiers destructeurs que nous portons avec la coalition nationale La Déroute des Routes.

La parole est à M. Guillaume Gontard, auteur de la question n° 234, adressée à M. le ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des transports.

Madame la ministre, en janvier 2022, plus d’une cinquantaine de collectifs en lutte, partout en France, se sont rassemblés pour créer une coalition, « La déroute des routes ». Ils contestent ainsi l’utilité de certains projets routiers et leur absence de cohérence tant avec l’accord de Paris qu’avec la loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets ou l’objectif « zéro artificialisation nette » d’ici à 2050.

Malgré une prise de conscience globale sur la nécessité d’une autre approche de nos mobilités, depuis soixante-dix ans, rien n’arrête les politiques de développement d’infrastructures routières alors même que le réseau routier français est déjà l’un des plus denses d’Europe.

La décision, récente et juste, prise par le ministre délégué chargé des transports, de suspendre les études de l’élargissement de l’A46 Sud à Lyon souligne le caractère dépassé de certains projets.

À l’heure actuelle, cinquante-cinq projets routiers sont contestés partout en France par des collectifs, des associations et des élus locaux. Une enquête publiée par le média Reporterre en mai dernier révélait que le montant total de ces projets représentait un coût de 13 milliards d’euros, alors même que l’état du réseau ferroviaire rend nécessaire un investissement de 100 milliards d’euros sur quinze ans.

Alors que nous n’atteignons pas nos objectifs en matière de report modal ou encore de planification ambitieuse et financée de la politique cyclable, il est temps de réorienter les investissements vers les mobilités utiles et durables.

Dans le département de l’Isère, dont je suis élu, l’exemple de la RD1075 dans le Trièves est significatif. Un montant de 56 millions d’euros a été facilement engagé pour des travaux d’aménagement routier, dont deux tiers étaient consacrés à des enjeux de vitesse, quand, dans le même temps, il a fallu plusieurs années pour réunir 30 millions d’euros afin d’éviter la fermeture de la ligne ferroviaire Grenoble-Gap. Toujours en Isère, la création d’un demi-échangeur Vienne Sud sacrifie les habitants de la commune de Reventin-Vaugris alors qu’une alternative réaliste et efficace existe.

Autre exemple, en Haute-Loire, l’inutile chantier du contournement de la RN88 détruit les terres agricoles sans la moindre considération.

Ainsi, madame la ministre, quelle est votre position sur la demande de moratoire des projets routiers et autoroutiers, et la nécessité de les réexaminer au regard tant des stratégies fixées par l’État que des enjeux climatiques, écologiques et sanitaires auxquels nous faisons face ?


Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. 

Monsieur le sénateur Gontard, le Gouvernement partage la nécessité d’une nouvelle approche de la route, notamment en matière d’émissions de CO2. Tel est le sens des nombreuses initiatives lancées en matière de décarbonation des transports routiers ou en faveur d’une évolution des mobilités routières, avec le développement du covoiturage et le partage de la voirie en faveur des modes actifs ou des transports en commun.

Néanmoins, la route représente 90 % des déplacements de personnes et du transport de marchandises, et reste un élément indispensable à la vie de nos territoires.

En outre, la situation de la cinquantaine de projets que vous évoquez est extrêmement variée. En effet, les uns dépendent de collectivités locales, les autres sont en service, d’autres encore sont reportés à des horizons lointains et ne sont plus étudiés. Ces différences de situation expliquent la nécessité d’une évaluation propre à chaque projet.

Pour toutes ces raisons, le Gouvernement privilégie une approche pragmatique d’analyse au cas par cas des enjeux des projets. Les différentes évaluations socio-économiques et environnementales soumises au public à l’occasion des déclarations d’utilité publique ou des autorisations environnementales permettent d’objectiver les suites à donner à chacun. Les travaux du Conseil d’orientation des infrastructures et la construction des prochains volets routiers des contrats de plan État-région permettront de fait un inventaire global des projets en cours.

Un moratoire global ne constitue pas une réponse adaptée au regard des enjeux de ces différents projets et des besoins spécifiques de chaque territoire, autant d’impératifs auxquels je sais le Sénat, comme moi, très attaché.

Guillaume Gontard, pour la réplique, évoque l’objectif du moratoire : « Pourquoi un moratoire ? L’objectif est, précisément, de ne pas prendre les projets un par un, chacun ayant une interaction avec les autres. Il est nécessaire d’avoir une vision globale. »

nous avons la persévérance avec nous,
on ne lâche rien,
comptez sur nous !

La réponse de la ministre déléguée, n’est pas une surprise. Le gouvernement n’a pas pour l’heure le courage politique face aux lobbys. Cela montre aussi qu’il y encore du travail pour faire entendre notre demande de moratoire comme une évidence face aux enjeux climatiques et pour des mobilités se substituant à la logique toute routière qui prévaut aujourd’hui.

Avec les copains-copines à la Déroute et dans les différents collectifs sur le territoire, une chose est claire : nous avons la persévérance avec nous. On ne lâche rien. Comptez sur nous !


Le collectif GCO NON MERCI dans ses 10 solutions pour faire sauter les bouchons,
milite pour des mobilités douces et durables