RÉFORME : « Les grands projets d’infrastructures de plus en plus contestés »

« ENVIRONNEMENT. Autoroute A69, aéroport de Notre-Dame-des-Landes, contournement ouest de Strasbourg… Partout, les grands projets d’aménagement suscitent des oppositions. Pourquoi ces infrastructures sont-elles devenues si conflictuelles ? » — Introduit la journaliste Déborah Berlioz dans son article « Les grands projets d’infrastructures de plus en plus contestés », paru dans le n° 4016 de RÉFORME sorti en kiosques le 2 novembre.

« ENVIRONNEMENT. Autoroute A69, aéroport de Notre-Dame-des-Landes, contournement ouest de Strasbourg… Partout, les grands projets d’aménagement suscitent des oppositions. Pourquoi ces infrastructures sont-elles deve-nues si conflictuelles ? »

Si les mobilisations contre les projets d’aménagement ne sont pas nouvelles, elles se sont clairement multipliées depuis un peu plus d’une dizaine d’années. L’organisation La Déroute des routes, créée en 2022, regroupe ainsi plus de cinquante collectifs de lutte contre des projets routiers en France. Pour Léa Sébastien, maître de conférences en géographie à l’université Jean-Jaurès de Toulouse, cette multiplication des conflits s’explique en partie par l’urgence écologique. « Il y a aussi une incohérence entre le discours national et les actions locales qui ne passe plus. […] »

Elle parle de « Résistance éclairée », reprenant des propos de Léa Sébastien. « Loin du cliché du zadiste anarchiste, les profils des opposants sont donc relativement variés » et prend l’exemple de GCO NON MERCI :

Un mélange que l’on retrouve dans le collectif GCO Non merci, créé il y a vingt ans pour lutter contre le projet de grand contournement ouest à Strasbourg. « Nous rassemblons des habitants, des militants, des élus locaux et même des pasteurs, explique Bruno Dalpra, membre du groupe depuis dix ans. Certaines associations nous ont également rejoints, comme Alsace Nature, qui nous a aidés à déposer les recours juridiques.

« Ces collectifs ont également de plus en plus tendance à se mettre en réseau et à échanger des informations », à l’exemple de la coalition nationale La Déroute des Routes que la journaliste puis, évoque l’aspect « crédibles » des oppositions qui développent de plus en plus des argumentaires et contre-projets.

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Pour le GCO, nous avions du mal à nous faire entendre au-delà des Vosges, se rappelle Bruno Dalpra. Alors que tout le monde parle de l’A69 ! »

Elle évoque ensuite les enjeux stratégiques autour des concertations contre lesquelles les oppositions tentent de répondre pour revendiquer leurs arguments au cœur duquel on retrouve l’un des piliers d’une lutte : la communication.

Si aujourd’hui, de plus en plus d’entre-elles sont médiatisées sur le plan national, ça n’a pas toujours été le cas.

De manière générale, les conflits d’aménagement ont davantage de résonance médiatique que dans le passé. « Pour le GCO, nous avions du mal à nous faire entendre au-delà des Vosges, se rappelle Bruno Dalpra. Alors que tout le monde parle de l’A69 ! »

A cette médiatisation, il faut aussi gérer les contre-feux :

« Cette médiatisation se fait cependant dans le cadre d’un discours très stigmatisant qui est celui de « l’écoterrorisme », regrette Kevin Vacher. Elle est bénéfique au sens où elle porte ces sujets dans le débat public, mais ce traitement médiatique peut faire peur à certains riverains qui voudraient s’engager. »

Pourtant les ZAD (zones à défendre») et autres actions de désobéissance civile ne sont pas le principal mode d’action de ces mouvements. « Le premier réflexe est quasiment toujours de passer par des voies démocratiques, comme la concertation, la pétition, l’interpellation des élus, ainsi que par des recours juridiques», explique Kevin Vacher.

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Pour Bruno Dalpra, « ces avis devraient être plus que consultatifs ».
Pour Léa Sébastien, il est également nécessaire de repenser les outils de concertation.

En définitive, les conflits autour de tel ou tel projet sont la résultante de concertations biaisées par les pouvoirs publics, évoquant ensuite « l’État de droit » pour justifier le passage en force à l’exemple du GCO auquel Déborah Berlioz fait référence et pour lequel 10 avis défavorables d’autorités publiques ont été prononcés. Il faut se souvenir que la justice administrative nous a donné raison en 2021, sans toutefois arrêter les travaux qui étaient quasiment achevés. Se pose en définitive la question de rendre plus contraignants les avis de ces autorités, conclut l’article, reprenant la remarque de Bruno Dalpra, membre de notre collectif sur la question :

Si quelques projets emblématiques comme les aéroports de Notre-Dame-des-Landes, d’Andorre ou encore le terminal 4 à Roissy-Charles-de-Gaulle ont bien été abandonnés, nombreuses sont les luttes qui n’aboutissent pas. Le GCO, par exemple, est entré en service fin 2021, malgré dix avis négatifs de différentes autorités publiques, dont l’Autorité environnementale. Pour Bruno Dalpra, « ces avis devraient être plus que consultatifs ». Pour Léa Sébastien, il est également nécessaire de repenser les outils de concertation. « Le problème aujourd’hui, c’est que le but de la concertation est de faire accepter le projet. On peut y discuter certains aspects techniques, mais on ne discute pas du bien-fondé de la nouvelle infrastructure. Pour limiter les conflits d’aménagement, une possibilité serait de mettre en place des concertations en amont, hors projet, afin de discuter avec les citoyens de ce qu’ils souhaitent pour leur territoire. »

Les grands projets d’infrastructures de plus en plus contestés

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