« Ne nous contentons pas de dénoncer l’artificialisation des terres. Arrêtons-la ! »
Depuis l’abandon de l’écotaxe par la France, de nombreux camions qui roulaient de l’autre côté du Rhin se sont rabattus sur la plaine d’Alsace pour éviter de payer l’écotaxe allemande. Résultat : les embouteillages grossissent, les gens qui travaillent dans l’agglomération de Strasbourg et vivent dans les villages avoisinant perdent de plus en plus de temps dans leur voiture le matin et le soir. L’occasion pour les entreprises des BTP et leurs bulldozers d’appliquer leur solution simple : faire sauter le bouchon avec une autoroute.
La simplicité se heurte pourtant au principe de réalité. Comme à Notre-Dame des Landes, Nonant-le-Pin ou Sivens, la mobilisation s’organise. Le Collectif non au GCO (Grand Contournement Ouest de Strasbourg) prend de l’ampleur. Les habitants s’organisent pour que leur région ne soit pas vandalisée. Dans tous les villages concernés, les affiches « NON au GCO » fleurissent sur les Murs. Et le slogan Vinci ge Heim, (Vinci casse-toi) commence à entrer dans les têtes.
Cette bretelle d’autoroute détruira plus de 400 hectares de la plaine d’Alsace, terres agricoles parmi les plus riches et les plus fertiles d’Europe. Elle détruira des hectares de surface boisée à deux pas des Vosges et à peine trente minutes de vélo du centre de Strasbourg. Elle génèrera un bruit incessant. Elle repoussera aux calendres grecques la mise en place de transport collectif et d’organisation alternative des déplacements dans la région strasbourgeoise.
Le retour du GCO nous place devant des choix. Sommes-nous obligés d’appliquer les vieilles recettes du passées, conçues il y a plus de 40 ans par la DATAR ? A-t-on le droit le réfléchir et de repenser notre rapport aux territoires?
L’étalement des zones urbaines est sans fin. Poussé par l’inflation des prix des terrains à bâtir, les gens vont de plus en plus loin des centres urbains pour se loger. Cette logique doit être inversée en privilégiant la densification de l’habitat urbain et en évitant que chaque capitale régionale ne reproduise au niveau local les travers de la centralisation parisienne.
Le GCO résoudra-t-il le problème des bouchons du matin et du soir ?
Non, car les gens continueront à prendre leur voiture pour aller au travail.
Non, car les camions seront encore plus nombreux à choisir de passer par l’Alsace, plutôt que par l’Allemagne ou par la Suisse.
Ne nous contentons pas de dénoncer l’artificialisation des terres. Arrêtons-la.
José Bové, le 6 avril 2017