Stop Amazon : Un modèle économique toxique
Mise à jour le 11 novembre à 12h40
Selon le Directeur général d’Amazon France, il n’y aurait pas de projets Amazon en Alsace. C’est du moins ce qu’il a annoncé mercredi 4 novembre sur BFM TV (extrait à revoir ici). Son propos est techniquement vrai avec la confirmation de l’abandon du projet à Dambach-la-Ville (67). Pour autant, l’annonce ne convint pas les opposants au projet du méga-entrepôt d’Ensisheim « Eurovia Project 16 » où l’ombre d’Amazon plane au regard des faisceaux d’indices concordants désignant le géant américain de l’e-commerce comme destinataire final.
Rassemblement maintenu à Colmar contre le projet d’Ensisheim
Une centaine de manifestants se sont rassemblés à Colmar jeudi 5 novembre autour de 14h, dans le respect des consignes sanitaires en vigueur, autorisé par la préfecture.
Plusieurs dizaines de militant.es, dont ceux d’Alsace Nature, de l’ADRA, du MAN, de la Confédération paysanne, notamment, et des représentants des commerçants, agriculteurs et autres organisations opposées à l’implantation, sont également intervenus.
Retrouvez l’ensemble des interventions dans les deux vidéos d’AlterPresse :
Même si le Conseil départemental de l’environnement et des risques sanitaires et technologiques (CoDERST) du Haut-Rhin avait été ajourné, les opposants au projet « d’Amazon » à Ensisheim avaient décidé de maintenir le rassemblement dans un contexte actuel qui pointe la menace du modèle Amazon dans la concurrence déloyale que génère le confinement avec la fermeture des commerces non-essentiels.
Au-delà du destinataire final du projet Eurovia 16 d’Ensisheim, se pose la question des méga-entrepôts générés par l’e-commerce et surtout le modèle destructeur d’emplois qu’ils créent vis-à-vis du commerce traditionnel et notamment celui des artisans commerçants locaux (1).
La question du modèle économique
Combattre le modèle Amazon est perçu par certains comme être « contre tout » et ou avoir une vision économique d’arriéré. Une fois encore, ici, ce n’est pas le fait qu’une entreprise cherche à gagner de l’argent qui est le problème, mais la manière pour y parvenir. Le monde d’Amazon, comme celui de Vinci, par exemple, est détestable. La création d’emplois est anecdotique. Pour un emploi créé dans l’e-commerce, c’est 2 à 4 emplois dans le commerce de proximité qui sont supprimés (1).
Economiquement, ça donne le vertige : au 3e trimestre 2020, Amazon a vu ses revenus bondir de 37% par rapport à 2019, à 81 milliards d’euros. Son bénéfice a triplé. Sa capitalisation dépasse celle des 40 plus grosses entreprises françaises.
« Surfant sur la révolution numérique et misant sur l´achat compulsif et le besoin immédiat, la firme américaine Amazon a bâti le plus grand supermarché de l´histoire de l´humanité en rendant dans l´instant, à portée de clic, tous les articles et données de la terre. À la tête de cet empire mondial, Jeff Bezos. Devenu l´homme le plus riche du monde[…]. »
Le Monde selon Amazon n’est pas le monde aussi idyllique que son créateur voudrait nous faire croire. « Quel est le prix de cette fulgurante réussite ? Ses conséquences, les implications, les enjeux sur le terrain, les résistances ? » – « Le monde selon Amazon » donne un aperçu de l’entreprise, « à la rencontre des pionniers de la compagnie – qui s´en sont démarqués pour certains-, des salariés de différents pays qui expérimentent au quotidien les limites du système, ce film, étayé par une enquête menée sur le terrain (France, Allemagne, Bruxelles, Pologne, Inde, USA), propose une plongée vertigineuse dans l´univers Amazon. Son histoire et sa conception du monde. »
Dans un autre documentaire, plus spécifique à la France : « Comment Amazon a conquis la France ? », on y apprend par exemple que pour Amazon, le marché Français est le 2e marché après celui des Etats-Unis. On y sous-entend également que l’emploi est un leurre, même si l’entreprise se vante de créer de l’emplois. La robotisation à venir de ses entrepôts et les recherches en innovation qu’elle finance, ne sont pas de bon indicateur en terme d’emplois humains dans un avenir proche.
La France, l’un des plus gros marchés d’Amazon avec 24 millions de clients… Mais derrière cet incroyable succès, les controverses se multiplient, sur les cadences et les conditions de travail des employés et la pression imposée à ses fournisseurs et partenaires. Pour la première fois en France, immersion en coulisses et enquête sur l’une des plus grandes entreprises du monde.
Un modèle économique toxique…
La lutte contre le géant américain de l’e-commerce rappelle d’autres luttes dont le dénominateur commun est la permission latente des Etats à laisser des multinationales dictées leurs règles. Comme pour Vinci que nous pointons du doigt dans sa manière d’agir sur le projet de Contournement ouest de Strasbourg (GCO), Amazon agit dans son intérêt qui n’est pas un intérêt général, mais au service de ses actionnaires, avec la bienveillance des pouvoirs publiques (Etat et élu.es complices) qui permet son expansion sans contrepartie réelle. Même si le géant américain revendique soutenir plus de 10 000 entreprises françaises, la part des produits de ces entreprises ne représentent qu’un faible pourcentage des références de la plateforme numérique, quand on sait que seules 16% des PME et TPE françaises vendaient en ligne en 2015.
(1) Sources : – étude de Mounir Mahjoubi à lire ici (PDF), résumée ici par Challenges – données US : rapport de l’Institute for local self reliance à lire ici avec une traduction disponible ici (PDF).