Pourquoi utiliser des TER au diesel sur des lignes électrifiées ? [] En réalité, la France n’est pas à la hauteur face aux enjeux !
– mise à jour le 29 octobre 2024 à 8h55
Promouvoir les alternatives au tout-routier face aux enjeux climatiques, sociaux et de santé publique est du bon sens. Le réseau TER est UNE alternative dans les trajets du quotidien. Aussi, le choix du matériel a son importance pour pousser la logique de santé face aux enjeux. Dans une tribune, un collectif de médecins pointe l’incohérence d’utiliser des machines diesel sur des lignes électrifiées.
Même si de plus en plus de lignes sont électrifiées et que des rames hybrides existent déjà, nombre de TER circulent encore au diesel en Alsace. Une pollution néfaste pour la santé des voyageurs et des agents de la SNCF, dénoncée par [] Thomas Bourdrel, porte-parole de Strasbourg Respire, sur la page Facebook du collectif.
FRANCE 3 ALSACE, 25 OCTOBRE 2024
Également radiologue, il se bat depuis une dizaine d’années contre cette « aberration » [].
Derrière l’aspect technique se cache le nœud du problème. Aux yeux de Thomas Bourdrel, cela représente un enjeu de santé public. Le médecin alerte en particulier sur les émissions de dioxyde de soufre, SO². « C’est très toxique, surtout en gare lorsque l’on préchauffe le moteur des trains pendant plusieurs dizaines de minutes. Ça équivaut aux émissions d’une centaine de voitures. »
Et puis, il y a la pollution à l’intérieur des rames. « Il suffit de voir les plafonds noirs de particules diesel dans les TER. On soulève aussi que c’est un problème de santé pour le personnel navigant et d’entretien, ajoute-t-il. Ce sont des particules cancérigènes fines, voire ultra-fines qui majorent les pathologies respiratoires chroniques, les cancers du poumon et les maladies cardio-vasculaires. »
Le médecin dénonce aussi derrière cette situation une certaine forme d’hypocrisie. « Nos politiques exhortent les citoyens à changer leurs habitudes, on met en place autour de Strasbourg une zone à faibles émissions en obligeant les gens à changer de véhicule. Il faut que la SNCF et les pouvoirs publics fassent les mêmes efforts. »
Dans la recherche d’alternatives pour sortir de la dépendance à la voiture, les promouvoir face aux enjeux climatiques, sociaux et de santé publique est du bon sens. C’est ce que nous défendons dans notre communication. Le réseau TER est UNE alternative dans les trajets du quotidien. Aussi, le choix du matériel a son importance pour pousser la logique de santé face aux enjeux. Le constat n’est pas nouveau.
Dans la logique d’une énergie plus vertueuse et sans ressource fossile, la cohérence voudrait qu’en matière de transport ferroviaire, les lignes TER soient électrifiées afin de réduire l’usage des machines au diesel. Ca, c’est pour la théorie.
En pratique, il convient toutefois d’avoir un esprit plus nuancé. Même si l’usage de matériel roulant fonctionnant au diesel pollue, cette pollution est toute relative comparativement à celle générée par le transport routier. Elle représente 0,3 % des émissions du secteur des transports.
Si il est crucial de faire baisser les émissions de gaz à effet de serre (GES), l’incohérence relevée par Strasbourg Respire — de faire rouler des machines diesel sur des lignes électrifiées — cache un autre mal bien plus inquiétant : la France manque cruellement d’un schéma directeur du transport qui tienne compte de tous les modes de déplacements vs choix des investissements vs intermodulabilité. En filigramme, c’est le talon d’achille d’une politique des transports où règne une incohérence qui bénéficie au modèle tout-routier.
LE SOUS-INVESTISSEMENT DES LIGNES SECONDAIRES NUIT À LA SANTÉ !
La France n’est pas à la hauteur des enjeux. En matière d’investissement ferroviaire, par exemple, elle est toujours dernière du classement européen. C’est un handicap parmi d’autres que le plan de financement de 100 milliards d’euros jusqu’en 2040, voté en 2023, ne rattrapera pas [1] [2]. Le gouvernement a fait des promesses, et puis… le 8 octobre dernier, le ministre des Transports a lui-même reconnu que ce plan était menacé. Pourtant, l’argent existe. Il suffit d’avoir du courage politique. Pour illustrer, la fraude fiscale est évaluée justement à près de 100 milliards d’euros.
La question des déplacements des personnes et des marchandises face aux enjeux que nous avons cités implique d’avoir une vision à 360° du transport. Strasbourg Respire a raison de pointer l’incohérence d’utiliser des machines au diesel sur des lignes électrifiées. Toutefois, ceci est une incohérence parmi d’autres. C’est toute la politique des transports et des choix budgétaires qui est au cœur d’un problème sans fond à l’heure actuelle. Sortir de la logique du tout-routier, notre combat, implique une vraie prise de conscience.
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