Le président de l’Union des Eglises Protestantes d’Alsace et de Lorraine s’exprime sur le GCO

Communiqué de presse de l’UEPAL:  octobre 2018

Depuis 2007, les Églises chrétiennes d’Europe célèbrent en septembre le temps de la création (voir Édito d’Infos CP septembre 2018 de Christian Krieger). Le 8 septembre était la « journée mondiale d’action pour le climat », qui selon les observateurs, a suscité en France la plus grande manifestation pour le climat jamais organisée dans l’Hexagone. La prise de conscience de l’« urgence climatique », avec son cortège de catastrophes naturelles et d’injustices croissantes pour l’accès aux ressources de la planète, gabegie pour les uns, misère pour les autres, affecte de plus en plus nos consciences et nous invite à une véritable conversion collective de nos modes de vie.

Dans notre « pré carré » alsacien, cet enjeu se traduit de manière aigüe par la « crise du GCO ». Confrontés à une situation concrète, des paroisses, avec leurs conseils et leurs pasteurs, se sont mobilisés contre cet équipement. Je suis interpelé à ce sujet par des membres de notre Église, des élus, des responsables économiques : est-ce le rôle des pasteurs et des paroisses que d’intervenir dans ce type de débat ? Je réponds : oui, bien sûr ! Si les déclarations d’intention de nos assemblées et nos labels « Église verte » ne sont pas que du « verdissage » (en anglais greenwashing) pour notre « marketing ecclésial », alors il arrive que dans des situations concrètes il faille « se mouiller » et prendre quelques risques ! Je ne sais pas si Dieu est pour ou contre le GCO (bien que j’aie ma petite idée sur la question !) et il ne nous appartient pas de le convoquer, même pour des causes que nous croyons justes (l’histoire nous a montré à quel point cela pouvait être dangereux !). Mais Jésus a prêché la justice et la paix pour ici et maintenant, et c’est notamment pour des raisons politiques qu’il a été crucifié. À cause de l’Évangile, nous avons donc le droit, et même le devoir d’interpeller les pouvoirs publics sur des situations d’injustice, sur le sort des réfugiés ou sur la manière dont est prise en compte la crise écologique que nous vivons.

Je suis allé à Kolbsheim rencontrer les pasteurs et la poignée de ZADistes. J’y ai trouvé des personnes, notamment la vice-présidente du Conseil presbytéral, choquées profondément par ce qu’elles avaient vécu et la violence déployée envers des personnes pacifiques. La gestion du dossier du GCO est à ce titre très problématique : la manière dont les décisions ont été prises et mises en œuvre, sans tenir compte de toutes les consultations et avis défavorables, donne l’impression que ces enquêtes ne sont que de pure forme, pour une décision déjà prise par avance. Cela met en cause la confiance dans la démocratie représentative : j’en veux pour preuve le fait inquiétant que des manifestants du 8 septembre ont déchiré leur carte d’électeur.

Celles et ceux qui critiquent le projet – experts environnementaux, élus locaux, responsables associatifs ou représentants des cultes – ne sont pas tous des illuminés irresponsables. Et je peux témoigner du fait que les pasteur(e)s qui se sont impliqué(e)s dans ce débat le font aussi dans le cadre de leur responsabilité pastorale d’accompagnement de leurs communautés et des personnes engagées sur le terrain. Ils et elles ont ainsi contribué, comme je les y ai rendu attentifs, au caractère pacifique des manifestations et à l’évitement des débordements violents.

Certes, les ZADistes sont des utopistes, qui rêvent d’un monde radicalement autre. Ils sont sensibles au fait que des chrétiens les accompagnent au nom de leur foi. Ils m’ont rassuré sur le fait que dans notre monde de réalités impitoyables il soit encore permis de rêver.

Christian Albecker, président de l’UEPAL