[LETTRE OUVERTE] Agence de la biodiversité : quels effets sur les projets ?

(Crédit Pierre Siegwalt)

(Crédit Pierre Siegwalt)

A l’occasion de la tenue à Strasbourg d’une conférence nationale sur la future Agence française de la biodiversité, qui réunira l’ONEMA (Office national de l’eau et des milieux aquatiques), les Parcs nationaux, l’Atelier technique des espaces naturels (ATEN) et l’Agence des aires marines protégées, Alsace Nature et le Collectif GCO Non merci ont souhaité alerter la ministre de l’écologie Ségolène Royal sur l’effritement de la biodiversité alsacienne. Une lettre ouverte lui a été envoyé le 18 mai, signée par Luc Huber, porte-parole du Collectif, et Daniel Reininger, président régional d’Alsace Nature.

Avec la « modernisation agricole » des années 1960, qui s’est poursuivie dans les décennies suivantes, l’endiguement du Rhin, les rectifications de l’Ill ou l’assèchement des prairies riediennes, c’est un cortège d’espèces extrêmement riche qui a peu à peu disparu dans notre région.

Alsace Nature et ses associations fédérées, grâce notamment au travail mené par l’Office des données naturalistes d’Alsace (Odonat) qui fête ses 20 ans cette année, ont dressé et fait connaître dès 1989, puis de façon plus exhaustive en 2003, les listes rouges d’espèces en danger. Depuis 2012, un important travail de réactualisation de ces listes est porté par 17 structures et 70 experts et concernant 9000 taxons de la faune alsacienne.

Malgré cette sonnette d’alarme maintes fois tirée, les mesures positives engagées ne permettent pas d’inverser la tendance. Pourtant, l’enjeu est énorme : la biodiversité est nécessaire à la vie humaine et utile à tous, par les services rendus par les écosystèmes – qualité de l’eau et de l’alimentation, stabilité des terrains, pollinisation, etc. Or, les arbitrages impactant directement cette biodiversité se font encore beaucoup trop souvent au bénéfice de lobbies industriels ou agricoles, mus non pas par la défense de l’intérêt général, mais par des impératifs économiques à court terme.

C’est le cas de la plupart des projets d’infrastructures routières passés mais aussi de projets à venir, dont le Grand contournement ouest de Strasbourg (GCO). En plus de ne régler ni les problèmes de pollution ni la congestion automobile à Strasbourg, cette autoroute sacrifiera 300 hectares de terres agricoles et supprimera définitivement des zones favorables au grand hamster ou au crapaud vert, espèces protégées au titre des nombreux textes européens ratifiés par la France. Ces projets font ou feront de la France le mauvais élève de l’Europe en matière de protection des écosystèmes, l’exposant une nouvelle fois à une condamnation.